SIA: Le parc im­mo­bi­lier, pièce maî­tresse du tour­nant éner­gé­tique

Plus de vingt parlementaires étaient présents au troisième petit-déjeuner organisé par la SIA au Palais fédéral. La SIA profite de l’intérêt des responsables politiques pour apporter des suggestions aux projets de loi sur l’énergie et sur le CO2.

Date de publication
28-01-2015
Revision
05-11-2015

Au mois de novembre, pour la seconde fois en 2014, la SIA a convié des membres du Conseil national et du Conseil des Etats à un petit-déjeuner sur l’énergie dans les murs du Palais fédéral. Plus de vingt parlementaires des deux chambres ont répondu présents. La SIA s’est réjouie de ce vif intérêt, qui vient à point nommé. En effet, la stratégie énergétique 2050, sur laquelle portent les débats de l’actuelle session du Conseil national, prévoit d’apporter dans les lois et les ordonnances toute une série de changements importants, mais aussi contestés, touchant à la politique énergétique. 

Au cours des derniers mois, la proposition du Conseil fédéral a été discutée par la Commission de l’environnement, de l’aménagement du territoire et de l’énergie du Conseil national (CEATE-N). La loi sur l’énergie est capitale pour le tournant énergétique. La SIA s’implique dans son élaboration, notamment pour les dispositions relatives aux bâtiments. 

La SIA considère qu’il est particulièrement positif que la CEATE-N aille plus loin dans les objectifs essentiels que le Conseil fédéral, et prévoit pour la loi une évaluation globale de toutes les formes d’énergie ; en plus du recours aux outils les plus performants, elle exige une mise en service conforme de la technique des bâtiments ainsi qu’un relevé de la consommation énergétique et une optimisation de l’exploitation (art. 46, al. e-h). Les possibilités d’économies d’énergie sont étonnamment élevées dans le seul domaine de la mise en service et de l’optimisation de l’exploitation. Par ailleurs, ces mesures sont amorties au bout de quelques années déjà, contrairement aux autres options d’économies d’énergie.

Le durcissement de la loi sur le CO2 vise à réduire l’utilisation des combustibles fossiles, entre autres par l’instauration d’une taxe sur ces derniers. La loi sur le CO2 prévoit avant tout une réduction des émissions de CO2 dans les transports en commun et les bâtiments. En ce qui concerne les bâtiments, un tiers des revenus de la taxe sur le CO2 sera, comme aujourd’hui, utilisé en faveur de mesures de diminution des émissions sur le long terme. Avec la proposition actuelle du Conseil fédéral, le montant maximal annuel de ce budget est augmenté et passe à 450 millions
de francs.

Dans son exposé, Adrian Altenburger, vice-président de la SIA, a expliqué les étapes essentielles que préconise l’Association pour progresser dans la voie du tournant énergétique. Urs Rieder, président du conseil d’experts SIA formation, a ensuite fait le lien avec la formation initiale et continue : les objectifs ambitieux du tournant énergétique ne seront atteints que si la formation prochaine d’un nombre suffisant de professionnels qualifiés est assurée.

Lacunes des labels énergétiques

 

Ces deux exposés ont lancé la discussion. Les parlementaires ont été surpris d’apprendre que les labels énergétiques courants ne couvrent même pas 40% de l’ensemble des besoins primaires en énergie. A ce jour, plus de 60% ne sont donc toujours pas assurés. Il est nécessaire de déplacer, plus qu’aujourd’hui, le centre d’intérêt de l’isolation et de l’énergie de chauffage vers une réflexion globale sur
l’énergie.

La voie SIA vers l’efficacité énergétique (cahier technique SIA 2040) est un instrument important qui sert de base à cette approche globale. Elle prévoit une analyse globale du bilan énergétique des bâtiments et des zones urbanisées, en tenant compte de l’exploitation, de la construction et de la mobilité. 

Dans son exposé, Adrian Altenburger n’a pas caché que la consommation énergétique des bâtiments est aujourd’hui de mieux en mieux maîtrisée sur le plan technique ; grâce à des systèmes d’isolation efficaces alliés à des modules photovoltaïques et des systèmes de stockage d’énergie de plus en plus performants, la maison à énergie positive, nouveau standard général de construction, semble n’être plus qu’une question de temps. Soulignant cette position, le conseiller national bernois Jürg Grossen (pvl) a cité en exemple son immeuble de bureaux, vieux de 15 ans : les besoins énergétiques pourraient être réduits des deux tiers sans entreprendre une grosse rénovation de façade, en apportant simplement des modifications techniques – un résultat inférieur au standard d’un bâtiment Minergie. 

Pour la mobilité en revanche, aucun retournement de tendance n’est en vue, contrairement aux bâtiments, a déclaré Hans Georg Bächtold, directeur de la SIA. Nos déplacements sont de plus en plus fréquents, sur des distances toujours plus grandes. Si l’on veut faire bouger les choses, envisager chaque bâtiment ne suffit plus, a-t-il ajouté. « Le tournant énergétique est également un sujet de société, l’enjeu résidant dans les changements nécessaires en termes d’aménagement du territoire. Si les gens travaillent de plus en plus sur les lieux où ils habitent, les trajets seront réduits et la mobilité connaîtra aussi un tournant. »

Intérêt économique du tournant énergétique

 

Beat Jans (PS) a, comme le Neuchâtelois Raymond Clottu (UDC), souligné l’importance économique du tournant énergétique. Depuis l’année 2000, l’augmentation de prix des importations de gaz et de pétrole a, à elle seule, coûté 6,5 milliards de francs à la Suisse. « Cet argent fait défaut au pays pour mettre en œuvre le tournant énergétique », déclare Beat Jans. « Nous devrions investir les milliards de francs que nous dépensons pour les énergies fossiles, c’est-à-dire le pétrole et le gaz libyens ou russes, à développer des brevets et encourager des innovations », revendique le conseiller national. Cet argent servirait en même temps à créer des emplois et à mettre en place une production électrique d’avenir en Suisse. 

Eric Nussbaumer (PS), conseiller national du canton de Bâle-Campagne, partage le point de vue d’Adrian Altenburger : le domaine de l’optimisation de l’exploitation, c’est-à-dire la conception et la gestion optimales des installations énergétiques, recèle d’immenses ressources inexploitées, qui, comparativement, pourraient être mises en valeur sans difficulté. La phase d’exploitation des bâtiments n’a, à ce jour, jamais été intégrée à la loi sur l’énergie. « La commission compétente vient de le faire », explique Eric Nussbaumer. « Notre objectif est qu’une obligation légale impose à l’avenir de contrôler l’exploitation d’un bâtiment et, dans la mesure du possible, de l’optimiser. »

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