Wait and see...

Si les résultats de l’enquête conjoncturelle du KOF laissent entrevoir une amélioration de la marche des affaires, ils indiquent également que la demande pourrait ralentir. En janvier 2022, l’humeur des bureaux d’études se résume donc en un mot: circonspecte.

Date de publication
23-02-2022

Il ressort de l’enquête trimestrielle du Centre de recherches conjoncturelles de l’EPFZ (KOF) menée en janvier 2022 que la situation économique des bureaux d’études s’est améliorée par rapport à la dernière enquête réalisée en octobre. Concrètement, les sondés sont 60% à qualifier leur situation économique de bonne, 38% à la considérer satisfaisante et seulement 3% à l’estimer mauvaise. Qui plus est, les carnets de commandes sont repartis à la hausse au cours des trois derniers mois et portent désormais à 11,5 mois. En revanche, pour ce qui est de l’évolution de la demande, de la fourniture de prestations et des bénéfices des derniers mois, les indicateurs sont en baisse par rapport à octobre.

Optimisme teinté de prudence

Dans l’ensemble, les attentes des bureaux d’études quant à l’évolution de leur situation économique dans les six prochains mois s’inscrivent dans la continuité des résultats de l’automne dernier: 85% tablent sur un maintien du statu quo, 9% estiment qu’elle devrait s’améliorer et 5% craignent une dégradation. On assiste toutefois à une résurgence de leur scepticisme pour ce qui est de la fourniture de prestations et de la demande dans les trois prochains mois. Pour ce qui est des prix, 8% des bureaux d’études comptent sur une augmentation, 86% n’attendent aucun changement et – bon point – seuls 6% pronostiquent une baisse au trimestre suivant. Il n’en reste pas moins que, s’agissant de la courbe de leurs résultats financiers, les bureaux se montrent plus prudents qu’ils ne l’étaient au quatrième trimestre 2021. Une chose n’a pas changé: les effectifs restent insuffisants aux yeux des sondés, qui sont même plus nombreux – soit 49% – à citer la pénurie de main d’œuvre comme frein à leur activité.

Les architectes sur la retenue

Les bureaux d’architecture ont revu à la hausse leurs estimations concernant leur situation économique: 53% la jugent bonne, 43% satisfaisante et seuls 5% la considèrent mauvaise. Rien à signaler du côté des carnets de commandes, qui portent toujours à 12,7 mois. Leurs évaluations de la demande, de la fourniture de prestations et des résultats financiers des trois derniers mois s’affichent en revanche à la baisse. Idem pour leurs attentes concernant la marche de leurs affaires dans les six prochains mois: seuls10 % des architectes estiment qu’elle évoluera favorablement, tandis que 81% pensent qu’elle restera sur la lancée actuelle et que 9% craignent une dégradation. Leurs prévisions relatives à l’évolution de la demande, à leur capacité à fournir des prestations et à leurs résultats financiers dans les trois prochains mois laissent transparaître une plus grande prudence. Quant à la courbe des prix, 5% des bureaux d’études estiment qu’elle croîtra dans les trois prochains mois, 88% tablent sur une courbe stagnante et 6% sur une baisse des prix.

Les ingénieurs confiants

Les bureaux d’ingénieurs ont nettement revu à la hausse leurs attentes concernant l’évolution des prix dans les trois prochains mois: 10% escomptent une majoration, 84 % estiment que les prix resteront stables et seuls 7% craignent une baisse. On note aussi, par rapport à octobre 2021, une amélioration de la marche de leurs affaires puisqu’ils sont quelque 64% à la considérer bonne, 35% à la juger satisfaisante et seulement 2% à la trouver mauvaise. Ces bons résultats se traduisent également par un optimisme accru concernant l’évolution de leur situation économique dans les six prochains mois: 8% des ingénieurs tablent sur une amélioration, 88% ne s’attendent à aucun changement notable et seuls 3% craignent une dégradation. L’évolution de la demande et de leur carnet de commandes dans les trois derniers mois se révèle aussi plus positive qu’en octobre 2021. Ils ont en revanche revu légèrement à la baisse leurs prévisions de la demande, de leur capacité à fournir des prestations et de leurs résultats financiers dans les trois prochains mois. Le bât blesse toujours au niveau de la main d’œuvre, qui constitue un problème récurrent: les bureaux d’ingénierie sont 52% à se dire freinés dans leur activité par un effectif insuffisant – un chiffre qui toutefois ne dénote qu’une légère augmentation par rapport à la dernière enquête.

Bonnes perspectives pour l’emploi

Aucune tendance claire ne se dégage des résultats de l’enquête trimestrielle actuelle, qui ne laisse conclure ni à une dynamique haussière, ni à une dynamique baissière. En effet, le baromètre conjoncturel – très contrasté – et l’indicateur de l’emploi qui a continué d’augmenter pour atteindre son plus haut niveau depuis 2000 se contredisent.

Dans son communiqué de presse du 2 février 2022, le KOF souligne que les résultats de l’enquête laissent présager une évolution favorable de l’emploi dans les mois à venir et ce, toutes branches confondues, mais de manière plus marquée dans l’industrie manufacturière et le commerce de gros. Quant aux entreprises du secteur de la construction, elles escomptent une forte progression sur le front de l’emploi – l’indicateur y relatif ayant atteint un niveau inédit selon le KOF. Les perspectives sont donc bonnes, à la fois pour les chercheurs d’emploi, mais aussi pour les entreprises, puisque ces chiffres témoignent d’une santé économique florissante.

Des indicateurs en contradiction

«Le baromètre conjoncturel du KOF augmente de 0,6 point en janvier. Les perspectives restent supérieures à la moyenne et nettement meilleures qu’en janvier 2021.» peut-on lire dans le communiqué de presse publié par le KOF le 28 janvier 2022. En effet, la croissance est la tendance générale qui se dégage du baromètre conjoncturel du KOF considéré dans son ensemble. En revanche, les différents sous-groupes présentent une hétérogénéité marquée. Concrètement, cela veut dire que les perspectives se sont améliorées sur le plan de la consommation, des services financiers et des assurances. En revanche, les indicateurs relatifs aux services, à l’industrie manufacturière et à la demande étrangère ont évolué moins favorablement qu’au mois précédent. Et dans le secteur de la production, qui regroupe l’industrie manufacturière et la construction, presque tous les paramètres de l’activité économique s’affichent en recul – notamment l’évolution des revenus, l’activité de production et l’exploitation des ressources.

Au regard de ces éléments qui peuvent apparaître contradictoires, une piste d’explication possible est l’origine des données: alors que l’indicateur de l’emploi repose sur les évaluations des sondés, le baromètre conjoncturel résulte de calculs réalisés par le KOF. Possiblement, cette contradiction peut aussi résider dans le fait même qu’il s’agisse de prévisions. Car une prévision, au sens économique du terme, c’est une prédiction basée sur des observations du passé et réalisée suivant des méthodes rationnelles. Les prévisions s’expriment principalement en variables – soit des grandeurs susceptibles de prendre différentes valeurs et sur lesquelles l’auteur des prévisions n’a pas ou peu de prise. Morale de l’histoire: ce qui doit arriver arrivera. Wait and see aurait dit Lord Asquith...

L’indicateur de l’emploi est calculé à partir des données récoltées dans le cadre des enquêtes trimestrielles du KOF. Les résultats du premier trimestre 2022 reposent sur les réponses fournies par quelque 4500 entreprises interrogées en janvier au sujet de leurs attentes et de leurs projets en matière d’emploi.

Le baromètre conjoncturel se fonde sur une série de références calculées par le KOF et la variation du PIB par rapport au mois précédent (sur la base de la trimestrialisation des données brutes du PIB suisse produite par l’Office fédéral de la statistique et apurée des effets de grands événements sportifs par le Secrétariat d’État à l’économie). L’objectif du Baromètre consiste, à l’aide de ces séries de référence, à prévoir avec un maximum de précision l’évolution de la conjoncture suisse.

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