Droit des marchés publics: centrer les concours sur la qualité
A l’occasion de l’audition parlementaire de la Commission de l’économie et des redevances concernant la révision du droit des marchés publics, la SIA et ses partenaires ont défendu les intérêts des concepteurs.
Au cours de la session d’automne (ou d’hiver), le Conseil national planchera en première instance sur la question de la révision totale de la Loi fédérale sur les marchés publics (LMP). La Commission de l’économie et des redevances dirigée par Susanne Leutenegger Oberholzer travaille désormais à l’élaboration d’un projet de loi crucial sur le plan économique.
Lors de l’audition de la commission, la SIA est parvenue, conjointement avec l’Alliance pour des marchés publics progressistes (AMPP) et l’Union suisse des sociétés d’ingénieurs-conseils (usic), à faire entendre sa voix dans le cercle des organisations invitées. Dans son discours, le président de la SIA Stefan Cadosch a souligné l’importance de la révision pour les concepteurs et mis en lumière ses incidences sur la construction, secteur de poids pour l’économie nationale. Fidèle à son engagement, la SIA a sensibilisé les législateurs à l’importance d’un environnement bâti de qualité.
Effet levier sur la chaîne de création de valeur
Au sens des interpellations déposées par le conseiller national Beat Flach et le conseiller aux Etats Olivier Français, Stefan Cadosch a appelé les parlementaires à prendre en compte les particularités des prestations intellectuelles dans la passation de marchés.
Soulignant que celles-ci ne peuvent être considérées au même titre que des marchandises, il a rappelé que ces prestations ont un énorme effet levier sur l’ensemble de la chaîne de création de valeur: «Un processus de conception innovant basé sur un savoir-faire de haut niveau se traduit à la fois par des progrès techniques et des économies au stade de la réalisation.»
Autrement dit: le choix de l’offre la moins chère dicté par la course au prix bas se révèle à long terme souvent beaucoup plus onéreux – tant pour les maîtres de l’ouvrage que pour le contribuable.
C’est pourquoi une dynamique de concurrence définie par le rapport prix/prestation doit être encouragée sur le plan légal. L’argument du prix, ressort populiste très efficace, s’avère au final catastrophique pour la branche des études, néfaste à la qualité des ouvrages et des espaces urbains et donc contraire aux intérêts des maîtres de l’ouvrage et des citoyens.
Rebondissant sur les propos de Stefan Cadosch, Mario Marti, avocat et secrétaire général de l’usic, a formulé trois propositions d’amélioration portant sur les articles 29, 38 et 41 du projet de révision de la LMP.
Il a d’une part plaidé pour que le critère du prix, à son sens inutilement mis en avant dans l’article 29, soit considéré comme un facteur parmi d’autres. D’autre part, les autorités adjudicatrices devraient être amenées à évaluer la réalisabilité des offres par rapport à leur prix et à les écarter au besoin. Mario Marti a en outre suggéré que les offres à prix cassé soient impérativement soumises à un examen – ce qui pour le moment ne constitue qu’une disposition facultative de l’art. 38.
Avantageuse reformulation
Le secrétaire général de l’usic a également plaidé pour que le terme d’offre « la plus économique » soit remplacé par le terme d’offre « la plus avantageuse » dans l’article 41. Cet élargissement sémantique permettrait une plus large application des critères d’adjudication et aurait dans le même temps pour effet de centrer la mise en concurrence sur la qualité et de réduire, voire de supprimer la pondération par le prix.
Les parlementaires semblent réceptifs aux arguments de la SIA a confié Stefan Cadosch à l’issue de l’audition. Il a réaffirmé le plein soutien de la SIA aux efforts d’harmonisation des autorités et sa conviction qu’une telle mesure permettrait d’enrayer la dynamique des coûts réglementaires.
Denis Raschpichler, arch. dipl. EPF, chargé de la passation des marchés au sein de la SIA ; denis.raschpichler [at] sia.ch (denis[dot]raschpichler[at]sia[dot]ch)