Une grande ca­no­pée dans le PAV

MEP Espaces publics de l’Étoile (GE)

Il fallait une idée forte pour l’aménagement du secteur de l’Étoile, au cœur du futur quartier Praille Acacias Vernets à Genève, le PAV. Avec sa grande canopée accompagnant la remise au jour de la Drize, le projet lauréat de l’atelier Roberta à Paris est d’abord un projet de paysage.

Date de publication
12-02-2025
Valérie Hoffmeyer
journaliste, architecte paysagiste et correspondante régulière pour Tracés.

L’Étoile est la main ouverte du PAV. Arrimée au bras de la Drize, cette petite rivière longtemps enfouie et actuellement remise au jour, elle compte dans sa paume une place reliée à une demi-douzaine de rues rayonnantes. À l’articulation du PAV nord et sud, son aménagement doit faire école pour la suite de ce grand projet de mutation urbaine. Ceci dans un contexte très contraint: les sols hébergent parfois tunnels et parkings, au-dessus desquels coule une rivière. Des voies de circulation d’importance sont à transformer, comme l’avenue de la Praille, qui va muter en une promenade réservée aux mobilités douces. Il va falloir résister, par un phasage délicat et encore à définir, aux énormes chantiers de construction, en cours et à venir. Puis dialoguer avec les rez-de-chaussée, prévus pour les affaires et les commerces et dont la programmation sera décisive pour la réussite du quartier. Et surtout offrir du confort, de la fluidité et de la fraîcheur aux personnes qui travaillent déjà dans le quartier et à celles et ceux qui vont l’habiter. 

La végétation, une aide à la décision

Les mandats d’étude parallèles se sont déroulés selon une procédure assez complexe, alternant deux ateliers, puis quatre dialogues avec les 34 membres du collège d’experts. Un méga dispositif d’évaluation, qui a retenu dix équipes pour le premier degré, puis quatre pour le second. «Cette manière de faire a permis une immersion progressive dans la complexité du site et du programme, souligne Céline Aubernias, de l’équipe lauréate pilotée par l’atelier Roberta (Paris). Il est vrai que nous connaissions peu les lieux, mais nous avons cheminé avec nos partenaires locaux et au fil des dialogues avec le collège, guidé·es par une idée forte: unifier sans uniformiser les espaces avec cette grande canopée, composée de milieux différents, traversant et organisant ce quartier, en total contraste avec ce qu’il est aujourd’hui.»1

Bien lisible sur les planches de rendu et dans la maquette, le geste de placer la végétation au centre du concept et des différents espaces a sans doute joué dans la décision finale. Il a aussi pu guider les innombrables décisions prises à toutes les échelles du projet. Sous le pilotage de la rivière, Intensité alluviale se lit comme une vaste infrastructure végétale, qui traverse et définit l’ambiance des places et des rues, organise aussi les parvis et les terrasses des rez-de-chaussée. Composés de hauts bosquets, de végétation typique des berges alluviales, de bosquets brise-vent frais ou tempérés et de bosquets secs, ces milieux sont installés dans des sols différenciés, plus ou moins drainants. La plaine alluviale de l’Arve devrait ainsi revenir à une nouvelle forme de fertilité, urbaine et vivante. Du moins lorsque la pleine terre est conservée, ce qui est loin d’être le cas partout dans ce secteur de l’Étoile.

Pilotées par des architectes paysagistes, trois des quatre équipes2 ont placé le vivant et ses dynamiques au cœur de leurs réflexions. Une approche qui s’émancipe notablement de l’image directrice de 20153, qui ménageait une grande esplanade à dominante minérale  et donnait la priorité aux avenues sur la rivière, en les bordant d’alignements réguliers en pied de façades. Autre preuve que le paradigme a totalement changé: la vision de l’atelier Roberta s’affirme en franche rupture avec le quartier d’affaires voisin de Pont-Rouge, morceau inaugural du PAV conçu en 2012. Minéral et dépourvu d’habitant·es, il essuie déjà les critiques, alors même qu’il vient d’être livré.

Notes

 

1. Entretien du 24 janvier 2025

 

2. La quatrième équipe, Guillermo Vazquez Consuegra Arquitecto, a opté pour une vision plus ornementale.

 

3. Image directrice de l’Étoile 2050 (Dupraz, Byrne, Swisstrafic, Ingeni). 

MEP Espaces publics de l’Étoile (GE)

 

Maître d’ouvrage: Département du territoire du Canton de Genève / Direction PAV et Ville de Carouge

 

Organisateur: Urbaplan, Genève

 

Procédure: Mandats d’étude parallèles à deux degrés, sur sélection, pour des équipes pluridisciplinaires pilotées par des architectes paysagistes et complétées à minima par des ingénieur·es civil·es, selon règlement SIA 143

 

Budget prévisionnel: 21 mio. CHF pour le périmètre du concept paysager, 11.4 mio. CHF pour l’aménagement de l’avenue de la Praille et la Place de l’Étoile (hors rivière), prix moyen 600.-/m2

Palmarès

Équipe Lauréate: 

Intensité alluviale, Atelier Roberta, Paris (Bureau Pilote) ; ESM Ingénierie, Genève ; Hekladonia, Paris ; Transitec, Genève ; Les Éclaireurs, Lyon.

 

Équipes du 2e Degré: 

Superposition fertile, Urbanité(S), Genève (Bureau Pilote); Dreier&Frenzel, Lausanne; Avis Vert, Carouge; AB Ingénieurs, Genève; Les Éclaireurs, Lyon; Citec, Genève

Une journée à l’Étoile, Guillermo Vazquez Consuegra Arquitecto, Séville (bureau pilote); Frei Rezakhanlou architectes, Lausanne; b+s ingénieurs, Genève; AqAg Arquitectura Agronomia, Barcelone

Fraîcheur de vivre, In Situ (Bureau Pilote), Lausanne; BMG Solution, Genève; Les Éclairagistes Associés, Lyon; bcph Ingénierie, Carouge; ZS ingénieurs civils, Petit-Lancy; Robert Perroulaz, Genève

 

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