École Per­ro­salle

Au point de rencontre de la plaine du Rhône et de la montagne, la commune d’Ollon s’inscrit dans un triangle ouvert qui s’étend concentriquement d’est en ouest. À la limite entre le coteau urbanisé et les grands champs occupant la plaine, trois bâtiments du système constructif modulaire dit «CROCS» formaient depuis 1985 le centre scolaire de Perrosalle. Composé d’une quarantaine de classes, d’une piscine et d’une salle de gymnastique, sa capacité d’accueil de 550 élèves ne suffit plus pour répondre au nombre croissant d’habitants. Aussi la commune d’Ollon organise-t-elle en 2017 un concours ouvert pour son agrandissement et sa rénovation en trois étapes.

Parmi les 27 projets reçus, la proposition lauréate d’eido architectes insère avec finesse quatre extensions dans la topographie singulière du site. À contre-pied de l’orientation nord-sud et de la volumétrie parallélépipédique des bâtiments CROCS, les deux nouveaux bâtiments (construits) se glissent dans les courbes de la pente, retrouvent l’alignement de la distillerie voisine et limitent ainsi les volumes de terrassement. D’après eido, cette implantation discontinue avec les CROCS, veut «laisser respirer» et permet de «ne pas entrer en concurrence» avec ce bâti existant. Il en découle aussi une richesse et une diversité d’espaces extérieurs, aménagés avec Verzone Woods Architectes, qui offrent aux élèves des préaux en escalier, sécurisés, où la végétation a repris sa place. Avec les toits à deux pans et la légère inclinaison des façades, l’ensemble reprend la morphologie des fermes environnantes pour s’intégrer au village.

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Dialoguer avec les CROCS

Livrés en 1974 et en 1985 par les architectes Jean-Pierre Cahen et Michel Weber, les trois bâtiments du centre scolaire de Perrosalle¹ sont représentatifs des CROCS, acronyme du Centre de rationalisation et d’organisation des constructions scolaires, développé dans les années 1965-1975. Il s’agissait alors de répondre rapidement au manque de bâtiments scolaires et de les adapter aux mutations pédagogiques de l’époque. Ils ont été bien entretenus et le projet prévoit, en seconde phase, leur assainissement ainsi que leur mise aux normes sismiques et incendie.

Face à cet héritage, les architectes eido se réapproprient avec intelligence les atouts de ce processus constructif : construction par trames, régularité du système et utilisation d’un matériau léger, résistant, dont le montage peut se réaliser en atelier, composition avec les matériaux locaux (le bois y remplace le métal et les grandes travées se veulent plus souples et ajustables). Comme l’explique Diogo Dos Santos, «la septième étape, qui est un bâtiment de classes, peut être réalisée en un tiers, deux tiers ou moitié, afin de répondre aux besoins scolaires auxquels nous feront face».

Constituer une filière locale et biosourcée

Sur ce projet, l’utilisation du bois (épicéa et sapin blanc) en massif et en BLC a été l’occasion de reconstituer un circuit court romand. L’ensemble des bois de charpente a été scié à Ollon, débité à Bulle (FR) ou à Rueyres (FR) et transformé à proximité d’Yverdon-les-Bains (VD). Le bureau eido met en avant une utilisation rationnelle du bois lamellé-collé (BLC), nécessaire à la fabrication des grandes portées (25 m) de la salle de gymnastique. Les architectes n’ont pas souhaité la maximisation des performances du matériau, et se sont concentrés sur un usage raisonné à l’échelle des usagers principaux, les enfants qui pratiquent les lieux. Discutant la mauvaise appréciation écologique du BLC, ils avancent que ce dernier a permis d’augmenter l’utilisation des bois locaux : en massif, seuls 20 % des billons étaient exploitables, quand ce ratio passe à 80 % avec le BLC.

Au sol est déployé un terrazzo comme dans les CROCS, dont les cailloux proviennent de la plaine du Rhône et des vallées neuchâteloises.

Toutes les techniques sont apparentes, les réseaux ne sont pas cachés par des faux-plafonds, les moises et les assemblages visibles, renforçant la dimension didactique de la proposition constructive. Des sorties en forêt avec les élèves ont également permis de les sensibiliser au parcours du bois.

Renouvelant à 50 ans d’écart la réflexion sur un mode constructif rationnel et reproductible, les architectes d’eido semblent tirer les leçons de l’évolution des CROCS, en corrigeant les défauts et en offrant une version améliorée : régionale et biosourcée.

Jaouida Zehou est architecte à Paris et Lausanne, membre du Groupe Architecte de la SIA Vaud.

Note

 

1. Noté 3 au recensement patrimonial: importance locale

Centre scolaire de Perrosalle, Ollon (VD), étape 1, phase 1

 

Maître d’ouvrage: Commune d’Ollon (VD)

 

Architecture: eido architectes

 

Ingénieur civil: Nicod Ingénieurs civils

 

Ingénieur CVSE: SRG engineering

 

Direction des travaux: Atelier d’architecture Joseph Cordonier

 

Paysage: Werzone Woods Architectes

 

Procédure: Concours ouvert selon SIA 142, 2018

 

Réalisations:  2021-2023

 

Coût global de la construction: CHF 30 848 200

 

Coût par m³/SIA: CHF 800

 

Coût par m³/SIA (CFC2): CHF 680