Les boîtes emboîtées de la Nouvelle Comédie
Du fait de la proximité de la gare des Eaux-Vives de la ligne du CEVA, la qualité du silence des salles de spectacle a dû être garantie par un traitement acoustique antivibratoire.
Ce traitement a d’abord consisté en une désolidarisation totale des deux bâtiments, par l’aménagement d’une tranchée de vide d’une largeur de 50 cm minimum entre la gare et la Nouvelle Comédie. Couplée à la construction d’une dalle flottante sous les rails du CEVA, cette mesure permet d’éviter la propagation en surface des vibrations, mais elle n’empêche pas leur transit par le terrain et les fondations des ouvrages. Si ces deux interventions «extérieures» garantissent une qualité de silence suffisante dans les salles de répétition et les espaces courants de la Nouvelle Comédie, elles ne suffisent pas pour les salles de spectacles, pour lesquelles une désolidarisation complète du reste du bâtiment s’est avérée nécessaire; celle-ci contribue aussi grandement à l’isolation acoustique des salles vis-à-vis des locaux voisins (ateliers, loges, salles de répétition, etc.) et de l’environnement extérieur.
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La salle frontale et sa cage de scène sont construites sur le principe d’une «boîte dans la boîte»: la scène et la salle constituent une même boîte, dite «intérieure», faite de planchers béton, de voiles béton et de plafonds plâtre autoportants. Cette boîte, dont la masse totale est d’environ 4500 tonnes, est entièrement contenue dans une seconde, dite «extérieure», intégralement en béton et appartenant au reste du bâtiment. Ces deux structures sont rendues indépendantes par des vides de construction évitant tout point de contact, à l’exception des 111 appuis antivibratiles à ressorts qui assurent le transfert des charges de la boîte intérieure vers les fondations du bâtiment. Un système de coffrage spécifique a été utilisé pour garantir le maintien d’un vide de quelques centimètres entre les murs verticaux des deux boîtes. Pour une partie des murs intérieurs, une technique basée sur l’utilisation de prémurs a été élaborée en coopération avec l’entreprise chargée du gros œuvre.
Pour la salle modulable, la boîte intérieure a été divisée en deux parties. La scène repose sur une dalle flottante sur appuis antivibratiles à ressorts, similaires à ceux utilisés pour la salle frontale. En revanche, les murs et le plafond ne reposent pas sur cette dalle, mais sont suspendus à la charpente métallique du gril de scène qui repose sur douze appuis antivibratiles à ressort placés sur des corbeaux accrochés aux murs longitudinaux de la boîte extérieure. Les murs de la salle, constitués d’une cloison ajourée de lames en béton fibré et d’une couche de fermeture acoustiquement étanche placée derrière, sont suspendus à la charpente par des profilés métalliques verticaux.
La partie inférieure de la salle modulable, sorte d’auge en béton d’environ 750 tonnes, repose intégralement sur 40 boîtes à ressort disposées sous une dalle mixte (charpente métallique de 25 tonnes et dalle béton de 20 cm). Quant à la partie supérieure, d’une masse totale de 315 tonnes, elle est suspendue par une charpente métallique de 21 tonnes, elle-même accrochée à la charpente métallique du gril d’une masse de 52 tonnes. Les mouvements des boîtes intérieures devant être possibles sans entrave, des détails spécifiques pour le passage des différents réseaux CVSE et pour les accès, notamment le traitement des seuils de portes, ont dû être élaborés.
L’équipement des salles est de la responsabilité du scénographe, qui définit aussi la structure nécessaire au support des installations de manipulation et d’éclairage de la scène. Le scénographe et l’ingénieur civil doivent donc étroitement collaborer pour se mettre d’accord sur la définition des charges devant être reprises par la structure du bâtiment.
La scène de la salle frontale est surmontée d’un treillis métallique de 61 tonnes qui s’appuie sur les murs intérieurs de la boîte et porte le plafond acoustique, le gril et le faux gril. Ce treillis supporte notamment les moteurs et les systèmes de poulies nécessaires au fonctionnement de cinquante dispositifs de levage situés au-dessus de la scène. D’une longueur de 14 mètres, ceux-ci sont tenus par six câbles et permettent la manipulation d’objets sur une hauteur de près de 20 mètres.
Jacques Perret, sur la base d’informations recueillies auprès de Laurent Gaudry et Davide Palma du bureau T ingénierie à Genève.