Les lu­mières de la ville

Editorial du 08/2016

Date de publication
13-04-2016
Revision
14-04-2016

Révolution: les années 1960 découvrent les lampes fluorescentes. Tout s’éclaire. Une lumière sans nuances irradie les villes, les autoroutes, les parkings de supermarchés. Griserie du néon, jusqu’à la lie : même en plein jour, les plateaux de bureaux des immeubles modernes n’ont plus besoin de lumière naturelle. La lumière artificielle devient matière de l’architecture et les bâtiments éclairent la ville autant qu’ils exposent derrière leurs façades de verre le nouvel homme tertiaire, transparent et normalisé, abdiquant sa part d’ombre. 

Révolution: les années 1990 découvrent les LED et l’éclairage urbain devient un métier. C’est le nouvel âge d’or des villes qui se parent de mille feux pour se faire plus belles les unes que les autres. Une nouvelle vague d’embellissement à la Haussmann. Porté par l’engouement pour l’espace public et quelques artistes stars comme Yann Kersalé, l’éclairage devient spectacle. De plans lumière en événements festifs, les métropoles s’illuminent comme si Noël durait toute l’année. 

Aujourd’hui, les villes revoient leur copie. L’austérité économique et les préoccupations environnementales et sécuritaires, souvent contradictoires, sont passées par là. De nouvelles innovations technologiques permettent désormais de gérer intelligemment les systèmes d’éclairage pour adapter l’intensité de la lumière en ville en fonction des usages et de l’heure du jour. A la clé, des économies non négligeables pour les collectivités et espérons-le une attention plus grande aux usages et besoins des citoyens. 

Car au fond, au-delà de l’efficacité énergétique, des normes et de la technologie « intelligente » qui vient se loger dans nos lampadaires, dans le sol de nos places et jusqu’à l’intérieur de nos appartements, la lumière est affaire d’expérience personnelle. Transfigurée par notre propre regard, si bien filmée par Godard, Scorsese ou Cassavetes, la ville la nuit peut être électrique et incandescente, qu’elle soit sur-éclairée ou sciemment maintenue dans la pénombre. 

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