Trêves de chantier
L’urbaniste Julien Pache a observé l’errance des chantiers suspendus en ville de Vevey. Lors de ces «trêves de chantier», temps durant lequel les travaux sont à l’arrêt, la rue n’est plus un support inerte, mais un décor transitoire sur fond de bandes rouges et blanches; l’occasion, pour ses usager·ères, de s’approprier différemment cet espace commun.
Dans nos villes, la rue semble en perpétuelle mutation. Divers travaux ouvrent ses sols et rénovent les façades qui la dessine. Des chantiers, tantôt imposants, tantôt d’échelle plus restreinte, entravent et contraignent pour un temps l’usage de l’espace public. En fin de journée ou à l’approche du week-end, ces ouvrages se mettent en pause. Seuls quelques éléments laissés en plan attestent que le travail reprendra. Dans le calme des «trêves de chantiers», les barrières incitent à de nouveaux cheminements; la danse quotidienne des passant·es doit se réinventer. On s’arrête, on contemple, on s’étonne, on contourne. On s’applique à faire abstraction de jalons jugés inesthétiques, mais probablement nécessaires. Bleues les obligations, barrés les interdits ; les injonctions affichées invitent également à prendre quelques libertés éphémères. L’obligation de s’arrêter au milieu d’une route barrée pare instantanément la rue des atours d’une place de village.
La photographie est utilisée ici avec un regard d’urbaniste, contribuant à penser la ville en interaction avec ses usager·ères; elle est un outil à la fois de lecture et de partage des pratiques observées. La série d’images qui ponctue ce dossier a été produite dans le cadre de l’atelier de reportage photographique «À travers rues», dispensé en automne 2023 à l’Université de Genève. Certaines d’entre elles seront à accrochées jusqu’au 10 mai dans le hall d’entrée d’Uni Dufour, dans le cadre du Festival Histoire & Cité, qui aura lieu à Genève, Lausanne, Nyon, Prangins, Neuchâtel et La Chaux-de-Fonds, du 15 au 21 avril 2024.
