Tran­sfor­ma­tions pa­vil­lon­nai­res: fai­re la mé­tro­po­le avec les ha­bi­tan­ts

Retour sur une exposition présentée au Pavillon de l’Arsenal à Paris du 14.12.2018 au 10.02.2019

Data di pubblicazione
07-03-2019
Revision
07-03-2019

Si la première image qui vient à l’esprit à l’évocation de la métropole parisienne est celle de l’habitat collectif, plus de 80% de l’espace dédié à l’habitat en Île-de-France est occupé par des maisons individuelles. Contre toute attente, Paris est la plus grande zone résidentielle pavillonnaire de France!

C’est dans ce contexte qu’est née l’idée d’une densification douce des zones pavillonnaires. Au lieu d’attendre que la pression immobilière et la modification du Plan local d’urbanisme (PLU) y permettent la construction d’immeubles collectifs, certains proposent d’alléger la réglementation afin d’autoriser chacun à agrandir ou à étendre sa maison sur son terrain, sous forme d’interventions plutôt légères et réversibles, en faisant passer le besoin de l’habitant avant celui d’une certaine idée de l’uniformité et de l’ordre.

L’idée avait déjà été formulée en 2011 par Yves Lyon, dans le cadre de l’Atelier du Grand Paris. L’architecte préconisait alors de créer un cadre législatif favorable à l’agrandissement des pavillons résidentiels. Lauréat du programme FAIRE1, le projet piloté par l’équipe de IUDo, présenté cet hiver au Pavillon de l’Arsenal, serait un compromis entre la libéralisation du cadre normatif préfigurée par la proposition de 2011 et l’état actuel des choses, celui d’une procédure longue et lourde, quand elle n’est pas tout simplement impossible. Le projet IUDo propose ainsi d’accompagner les propriétaires dans la configuration d’un projet d’extension, de la préfiguration à la mise en œuvre.

La ville d’Arcueil, au sud de Paris, a ainsi lancé un appel auquel ont répondu huit propriétaires. L’invitation à prendre part à des ateliers devait aboutir à la mise en œuvre d’un projet d’extension/densification. Chaque cas a été piloté par un architecte différent. Les projets retenus vont de la simple réhabilitation à l’extension en passant par l’aménagement des combles. Les profils des candidats varient, depuis les retraités qui souhaitent ajouter une extension autonome à leur propriété afin de louer et d’arrondir leurs fins de mois, jusqu’aux actifs qui veulent installer leur activité sur leur lieu de résidence. Il y a aussi des familles qui désirent créer une extension indépendante pour un des enfants qui, en grandissant, a besoin de plus d’autonomie.

Huit projets sur mesure

L’initiative IUDo fait preuve d’une approche très attentive dans sa façon d’articuler une construction avec un véritable besoin. En cela, la démarche semble transposer dans le contexte de l’habitat la tendance actuelle croissante à individualiser le cadre de vie. Ouverte et reconductible, l’initiative fonctionne comme un dispositif qui permet de traduire une demande particulière en construction. Le projet, qui se veut le préambule à une généralisation, propose d’augmenter la liberté d’aménager, tout en la conditionnant à certains critères quantitatifs et qualitatifs, préalablement fixés. L’accompagnement fonctionne comme un garde fou, une garantie de la cohérence constructive, tant du point de vue de la technicité que de l’esthétique.

Le projet s’inscrit, sans en faire partie, dans la réflexion qui avait été inaugurée il y a un an autour du «permisdefaire»2. L’un comme l’autre témoignent d’une volonté de traduire en émancipation citoyenne une hypothétique autorisation généralisée de construire.

Rappelons que si, en France comme en Suisse, la liberté de construire en zone pavillonnaire reste limitée, d’autres sociétés n’y voient aucun inconvénient. C’est le cas des villes japonaises, où la rareté et le prix exorbitant du foncier conditionnent les usages. Construire une extension sur un bien dont on hérite est souvent l’une des seules façons de s’acquitter des droits de succession.

La qualité urbaine des zones pavillonnaires japonaises devrait servir d’exemple à ceux qui redoutent encore les conséquences d’une telle libéralisation. Si la densification réduit les espaces libres et les jardins de certains quartiers, elle permet aussi de créer des situations de proximité et d’animation tout à fait intéressantes. Le projet IUDo tient compte de cet enjeu en les mettant en scène dans le récit qui est fait de l’initiative. Pour résumer, il s’agirait de remplacer deux qualités, l’aspect aéré et le calme, par deux autres: la convivialité et le partage. 

 

Notes

1. «Lancé par le Pavillon de l’Arsenal avec le soutien de la Ville de Paris, de la Caisse des Dépôts et en partenariat avec l’Ordre régional des architectes d’Île de France, les écoles nationales supérieures d’architecture d’Île de France et l’école Urbaine de Sciences Po, FAIRE est une plateforme expérimentale destinée aux architectes qui a pour ambition de faciliter la réalisation de prototypes échelle 1:1 dans le Grand Paris, d’accompagner et promouvoir la recherche appliquée et de favoriser la mise en œuvre de nouveaux process, matériaux et programmes de construction.» (pavillon-arsenal.com) 
2. En France, l’article 88 de la loi LCAP du 7 juillet 2016 a introduit le dispositif du «permis de faire», qui offre la possibilité de déroger aux règles de sécurité incendie et d’accessibilité, sous réserve d’atteindre des résultats similaires, pour les équipements publics et les logements sociaux.

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