L'or­tho­go­na­li­té Réin­ven­tée

Des logements pour étudiants réalisés par le bureau Charles Pictet architecte FAS SIA

L’immeuble d’habitation pour étudiants, rue de la Coulouvrenière à Genève, incarne parfaitement les convictions de ses concepteurs quant à la fabrique de la ville. Charles Pictet est un défenseur de la densification du centre ville et c’est exactement ce qu’accomplit ce bâtiment.

Data di pubblicazione
09-01-2012
Revision
19-08-2015

Construit pour une coopérative d’étudiants, le nouveau bâtiment est constitué de quarante-six chambres réparties en  huit appartements. Situé sur la place des Volontaires, l’immeuble tout en brique s’insère dans un quartier animé. De leurs fenêtres, ses occupants peuvent apercevoir l’Usine, haut lieu de la culture alternative genevoise, ainsi que le bâtiment des forces motrices, une ancienne usine hydroélectrique reconvertie en salle de spectacle. 
L’immeuble à l’aspect sobre vient compléter un patchwork hétéroclite d’édifices qui se répondent sans se ressembler. Les efforts fournis pour rattacher la nouvelle réalisation à son environnement, sont discrets mais efficaces. Ils passent même inaperçus et c’est bien leur principal mérite. Les variations de la pierre des façades du bâtiment des forces motrices ont servi d’échantillon pour déterminer les tons de la brique utilisée. Cette concordance est un des éléments qui génère l’intégration, l’autre étant la volumétrie.
Le bâtiment réconcilie par sa forme trois stratégies de développement urbain consécutives. Celle qui commande l’implantation d’activités industrielles et artisanales au 19e siècle, celle qui à partir des années 60 s’efforce d’assainir et d’aménager les quais du Rhône en y implantant des barres d’habitation, et la toute dernière qui, suite à l’abandon de ce plan dans les années 70, prévoit de reconstituer l’îlot. Le projet répond à ces différentes étapes de l’histoire de la ville en les conjuguant.

Jeu des volumes

L’édifice jouxte un immeuble d’habitation de quatre étages ainsi qu’une barre de sept étages contre laquelle il est adossé. La qualité du bâtiment repose sur la justesse avec laquelle il se positionne dans ce contexte difficile. Loin de toute exubérance, il accomplit avec souplesse la transition entre les deux ensembles hétérogènes. Un jeu astucieux de renfoncements lui permet de s’adresser tant à l’un qu’à l’autre. A partir de la place, l’immeuble en brique  semble constitué de deux volumes qui s’imbriquent. Le léger retrait du volume le plus élevé et l’alignement du premier plan de la façade sur le bâtiment bas, confèrent à l’ensemble la justesse qui est celle, dans un jeu de construction, d’un empilement bien équilibré. Inventif, le jeu des volumes tire sa pertinence de son caractère tout à la fois asymétrique et nécessaire.
Le résultat est un ensemble qui complète la place par une forme plurielle, sans pour autant ériger la pluralité en manifeste. Il traduit la complexité qui est celle toute évidente de la ville, stratifiée et multiple. Il parvient ainsi à marier les deux conditions conflictuelles qui déterminent l’identité de la place : l’effervescence du centre culturel et la tranquillité d’un quartier résidentiel. L’immeuble de Charles Pictet se trouve entre les deux : il propose de l’habitat pour la tranche d’âge qui fréquente l’Usine, c’est-à-dire les étudiants. 
Si cette vision des choses paraît anecdotique, elle n’en est pas moins appropriée pour traduire une certaine  disposition qu’ont ses réalisations à trouver le juste milieu.

Exigences écologiques

Il va sans dire qu’un tel projet ne pouvait ignorer les exigences écologiques croissantes de notre époque.  Au-delà de l’isolation qui explique en partie l’épaisseur des murs, c’est l’approvisionnement en eau chaude qui constitue l’innovation la plus remarquable. 100?m2 de panneaux solaires alimentent le système de stockage saisonnier censé couvrir les besoins sanitaires et aussi le chauffage. L’irrégularité de l’accès à l’énergie solaire est contrecarrée par le stockage de l’eau en grande quantité. Les deux cuves placées au sous-sol cumulent 20 000 litres. Ce système simple, développé par l’agence d’ingénieurs PIC, constitue une réponse pertinente à l’impératif de réduction de la facture énergétique. 
Priés de ne pas abuser de l’ouverture des fenêtres, les étudiants disposent de chambres qui donnent toutes sur la place. Chaque fenêtre sur la façade correspond à une chambre. Au fond de chaque couloir se trouvent les espaces partagés : le séjour d’un côté et une grande cuisine lumineuse de l’autre. En termes de qualité de vie, le plus beau cadeau des architectes aux futurs habitants est la salle commune au sixième étage et sa grande terrasse extérieure, avec une vue imprenable sur Genève. Cette dernière, contemplée depuis la terrasse, offre son plus beau spectacle : celui d’une ville qui n’a pas peur de la densité et qui sait jouir de son identité urbaine.

 

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