Place de la Riponne
Et les gagnants sont…
Un projet lauréat pour la Riponne et une victoire pour la participation citoyenne. Le jury public du 1er mars qui s’est tenu au Palais de Rumine à Lausanne a scellé un processus de jugement rare en Suisse.
Aux yeux de nombreux (non-)Lausannois, la place de la Riponne est à l’image du personnage fictif de la RTS qui l’habite1: un protagoniste de la ville quelque peu abîmé, une figure familière à qui on ne peut souhaiter que le meilleur. C’est donc avec enthousiasme que l’on accueille le résultat des mandats d’étude parallèles pour le réaménagement de la place de la Riponne, et du processus duquel il est issu. Le jury s’est tenu le samedi 1er mars, en public. Portée par les architectes-paysagistes de Paysagestion, la proposition lauréate Au soleil, sous la pluie cultive une ambiguïté heureuse en estompant autant que possible les contours abrupts de la place. Là où le concours d’idées Riponne\Tunnel (2019)2 établissait une dichotomie entre une place du Tunnel végétale et une Riponne minérale, le projet tend à réduire a minima les proportions de l’esplanade au pied du Palais de Rumine au profit d’un paysage en creux, davantage verdoyant et immersif.
Vous trouvez les planches des projets sur competitions.espazium.ch
Les gagnant·es, ce sont aussi les autres, les habitant·es, les curieux·ses, les «profanes» selon la ligne directrice SIA 142i‐402f Implication du public, et dont Gabriela Marcovecchio se fait l’écho dans son article sur la participation et la transparence dans les concours3. Le dispositif de jugement en public des places du Tunnel et de la Riponne apparait comme le prolongement naturel d’un processus participatif engagé sur le long terme, un instant si rare qu’il fait événement. Ce dernier jury a également permis de franchir une étape supplémentaire en rendant accessibles les délibérations non seulement au public, mais également aux équipes concurrentes – et ce, non sans une certaine émotion. Que ce soit dans la salle du jury ou dans celle où les échanges sont retransmis, chacun·e a pu mesurer l’ampleur du travail accompli, soumis en direct à la critique. Mais face à la demande croissante d’implication des usager·ères à toutes les étapes du projet, serions-nous capables de généraliser ce type de dispositif?
Lire également l'article: «Des conclaves et des profanes – la participation et la transparence dans les concours»
Pour le moment, la SIA estime appropriée l’implication du public uniquement pour les «missions revêtant un intérêt public élevé». Il faudrait tout d’abord définir par l’usage ce que signifie l’intérêt public élevé: s’agit-il d’une question de taille, de fonds publics engagés, de projets ayant déjà essuyé un recours? Ces rares mises en concurrences participatives doivent-elles toujours relever de l’exceptionnel? L'impact serait-il plus fort quand les enjeux en termes d'images le sont moins?
Quant à penser les modes de retransmission de ces jurys publics, jusqu’où serait-il possible d’aller? Outre les efforts techniques et économiques qu’ils requièrent, revoir a posteriori un jugement filmé, appuyer sur pause et figer une parole qui échappe à un membre du jury laisse des traces. D’ailleurs, se sachant filmé, le collège d'expert n'est-il pas forcé de jouer un rôle, comme au théâtre, ou à l’école? Plus, suivre un jury en direct depuis son écran soulèverait une question plus large sur la nature de l’investissement du public concerné. Mais surtout, cela ne devrait pas se substituer à une présence physique pour saluer les personnes impliquées dans le processus, autant le jury, les organisateurs et les techniciens de la Ville, que les équipes concurrentes qui ont fourni un nombre incalculable d’heures. Samedi 1er mars, le gagnant, c’est le collectif.
Notes
1. Sébastien ou Serge Jacquet, interprété par Vincent Kucholl
2. Voir «Riponne Tunnel: de quoi le concours d’idées est-il le nom?», Stéphanie Sonnette, 09.01.2020, disponible sur espazium.ch
3. Voir «Des conclaves et des profanes – la participation et la transparence dans les concours», Gabriela Marcovecchio, disponible sur espazium.ch
MEP réaménagement de la Place de la Riponne, Lausanne (VD)
Maître d’ouvrage: Ville de Lausanne
Organisateur: Plarel architectes & urbanistes
Procédure: Mandats d’étude parallèles participatifs organisés en procédure sélective selon règlement SIA 143
Coût cible: CHF 1000.-/m2 hors honoraires, pour une surface totale de la place de 20'000 m2
Palmarès
Équipe Lauréate:
Au soleil, sous la pluie; Paysagestion, Lausanne (Bureau Pilote); Localarchitecture, Lausanne; Ingphi, Lausanne; Mrs Partner; Luca Rossi; O technic; Martine Jaquet; Alterna; Association Kraft; Rez Actifs
Équipes sélectionnées :
Arbres de jouvence; Atelier ADR, Genève (bureau pilote); Bakker & Blanc architectes associés, Lausanne; Küng et Associés, Echallens; UrbanMoving ingénierie/WAYS Ingénierie; BMG Solution; Hyperchrome; mille et une villes
47 I/s; Atelier Georges, Montreuil (bureau pilote); MMNK, Paris; Sd ingénierie Genève, Petit-Lancy; BFMAG; MOP_A; Noctiluca
Trouver sa place; Base, Lyon (bureau pilote); Baubüro in situ, Rolle; B+S ingénieurs, Genève; RR&A; Atelier Franck Boutté; Befluid; Lumière électrique; Observatoire de la ville et du développement durable
Le grand théâtre vaudois; ILEX, Lyon (bureau pilote); Amsler Dom architectes associés, Lausanne; T ingénierie (Vaud), Lausanne; Citec; Concepto
Les projets seront exposés sur la Place de la Riponne en juin 2025. Tous les documents relatifs à la procédure sont actuellement disponibles sur le site de la Ville de Lausanne.