SIA: Les en­jeux du tour­nant éner­gé­ti­que

Data di pubblicazione
03-09-2014
Revision
05-11-2015

Le parti-pris politique en faveur des énergies renouvelables a des répercussions considérables sur le système d’approvisionnement en énergie. Parallèlement aux questions de transformation du réseau, le congrès « Energie électrique et bâtiment » était consacré à la mise en œuvre concrète de la production décentralisée et du stockage de l’électricité.
Pour beaucoup, le tournant énergétique est avant tout synonyme d’économies d’énergie, d’accroissement des énergies renouvelables et de bonne isolation des bâtiments. Le problème est en réalité plus complexe : dès que les bâtiments passent, grâce à la photovoltaïque, aux centrales de cogénération et à la géothermie, de consommateurs à producteurs d’énergie, les répercussions se font sentir sur tout le système de distribution et de stockage d’énergie. Ces problématiques, c’est-à-dire les conséquences sur le système existant orienté de manière unidirectionnelle dans le sens centrales-consommateurs, ont alimenté les débats du congrès « Energie électrique et bâtiment ». 
Chercheurs et hommes politiques, représentants des communes et des fournisseurs d’énergie ont répondu à l’invitation de la SIA et de SuisseEnergie afin d’actualiser leurs connaissances sur l’état actuel de la discussion et des ressources techniques. Au cours de la matinée rythmée par les exposés des spécialistes, deux constats importants se sont imposés aux auditeurs : tout d’abord, les experts sont d’avis qu’un tournant énergétique cohérent est réalisable en Suisse. En effet, les énergies renouvelables deviennent d’année en année plus abordables, et leur part ne cesse de croître. Enseignant à l’Institut d’électronique de l’EPF, Anton Gunzinger a expliqué, que depuis peu, les coûts annuels des systèmes de chauffage électriques sont inférieurs à ceux des systèmes alimentés par des énergies fossiles. Il est convaincu que l’approvisionnement de la Suisse en énergie électrique pendant les six mois d’hiver peu ensoleillés pourrait être assuré par des énergies renouvelables à 100 %, à condition d’associer davantage l’énergie éolienne au photovoltaïque et à l’énergie hydraulique, bien représentée en Suisse. Anton Gunzinger et Rudolf Rechsteiner, ancien conseiller national lui aussi présent en tant qu’orateur, ont été catégoriques : depuis longtemps, le spectre de pénuries d’approvisionnement ou d’une énergie très onéreuse est contredit par la réalité.

L’importance des technologies de stockage performantes


Second message clé de la journée : il nous reste plus d’un défi à relever sur la voie d’un système énergétique décentralisé basé sur des sources renouvelables, mais cette voie est praticable. Concrètement, il s’agit d’exploiter les excédents de l’énergie issue de la force hydraulique ou de la photovoltaïque grâce à une technique moderne de stockage lors des saisons à rendement faible. Toutefois, on ne doit pas viser uniquement un équilibre entre la période estivale et la période hivernale, mais aussi au cours de la journée et au sein d’un réseau : Manuel Iseli, directeur de projets dans la planification du réseau des Liechtensteinische Kraftwerke, a décrit la transformation croissante de son entreprise de simple fournisseur en gestionnaire de réseau : celle-ci réduit sa production quand, les jours d’été ensoleillés, l’injection de courant depuis les nombreux panneaux photovoltaïques privés bondit. Si, en revanche, un front orageux traverse le pays, les centrales augmentent la puissance des turbines afin de compenser la baisse brutale de l’alimentation et de garantir une tension constante. 
Quelle part de ces enjeux le monde politique doit-il assumer ? Erich Nussbaumer, conseiller national PS du canton de Bâle-Ville, a plaidé en faveur d’un cadre fiable pour tout investissement dans les énergies renouvelables, comme c’est déjà le cas pour l’électricité de production décentralisée avec la rétribution du courant injecté (RPC). Après la pause de midi, de nombreux exemples ont illustré les possibilités actuelles. La maison à énergie positive conçue par le cabinet d’architectes Setz à Rupperswil (AG) est l’exemple de bonnes pratiques par excellence : grâce à une enveloppe de bâtiment efficace et des installations techniques innovantes, cette petite centrale électrique produit plus d’énergie que nécessaire pour le chauffage, l’eau chaude et l’électricité des trois appartements, de sorte qu’elle peut aussi alimenter les véhicules électriques. 
Directeur de l’Institut de l’Energie dans le bâtiment à la Haute école spécialisée de la Suisse du Nord-Ouest (FHNW), Jürg Bichsel s’est heurté à une objection lors de la table ronde qui a suivi : en effet, ce bâtiment pilote bénéficierait de conditions idéales, tandis qu’aujourd’hui près de 80 % des réalisations dans le bâtiment suisse se feraient dans l’existant, où il est difficile d’imaginer épuiser toutes les ressources. C’est Dionys Hallenbarter, conseiller en énergie et porte-parole d’Energieregion Goms, qui a magistralement démontré comment le tournant énergétique pouvait être instauré dans le cadre des structures existantes : dans le district rural de Conches (Haut-Valais), plusieurs petites communes se sont unies en 2008 pour produire l’électricité nécessaire. Elles ont misé sur des sources très diversifiées, tel est le constat principal de l’exposé très encourageant de Dionys Hallenbarter. Il n’y a pas une solution, mais des solutions sous forme de combinaisons variables de nombreuses sources d’énergie. Les communes de ce district produisent aujourd’hui leur énergie en exploitant des installations de plaquettes forestières, des petites centrales hydro-électriques, des éoliennes, des installations solaires thermiques et des panneaux photovoltaïques. Comme l’a souligné le conseiller, aucun module photovoltaïque n’est visible dans les centres anciens par respect pour les bâtiments anciens classés monuments historiques. En quête de supports alternatifs, on a, par exemple, fixé les modules sur des ouvrages paravalanches, où ils bénéficient d’une exposition au soleil encore plus favorable. 
Le vice-président de la SIA et expert en énergie Adrian Altenburger s’est montré satisfait des impulsions suscitées par cette journée : « Il était important pour le conseil d’experts SIA énergie de sensibiliser l’auditoire à ce thème, d’en éclairer tous les aspects et d’en faire l’objet d’un échange réciproque. » La séquence dite « interactive » organisée à la fin de la journée ? des entretiens de 10 minutes menés par les experts autour des tables du foyer, permettant commentaires et discussions en petits groupes ? a honoré cette dernière exigence.

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